- HIÉROGAMIE
- HIÉROGAMIEHIÉROGAMIELe dieu d’Israël est un dieu mâle. (Il est pensé comme père.) Mais il n’a pas de déesse parèdre. Et, paternité mise à part, il est sans attributs sexuels. Les paganismes sont moins réservés. La sacralisation du sexe y joue un rôle important. Les divinités ont elles-mêmes une vie conjugale, familiale et sentimentale (parfois orageuse). Les mariages entre dieux et déesses (hiérogamies) ne sont pas seulement des anthropomorphismes. Ce sont des hymens théogoniques et cosmogoniques: ils ont pour but d’expliquer soit la génération de dieux dérivés, soit l’engendrement de l’Univers. En outre, ils ont valeur paradigmatique: ils servent de modèle, de justification et de consécration aux mariages humains. Enfin, ils entraînent une mythique complexe d’union aux dieux ou déesses. Les fidèles se vouent à ceux-ci de façon contradictoire: tantôt par abstinence et chasteté, tantôt par accouplement mystique. Le mariage avec le dieu ou avec la déesse peut s’accomplir en esprit. (Ces noces de l’âme ont gardé un sens, même en contexte chrétien.) Il peut être consommé dans la chair, grâce aux représentants des dieux ou déesses, prostitués sacrés (des deux sexes), ou bien prêtres et prêtresses. En dépit de ces apparences, cette nuptialité céleste et réaliste ne tire probablement sa signification ni de la sensualité ni de l’érotisme. On s’unit à la divinité pour avoir commerce avec la puissance, avec la source de vie, de salut, de création et de procréation. On a la conviction qu’elle se donnera si on se donne à elle, si on s’abandonne. (La symbolique sexuelle exprime ici l’échange d’amour mais aussi la mort à soi par défaillance, ivresse, extase.) La preuve que l’union mystique n’est pas vulgairement à base de jouissance, de dépravation (et n’est pas liée exclusivement à des cultes de fécondité) est fournie par le fait qu’une même religion, par exemple celle de Babylone, admet la continence au même titre que la luxure (l’une et l’autre réglées, ritualisées) comme signes des épousailles divines. Le christianisme a fait évoluer la sensibilité religieuse. Mais son éloge de la virginité, des fiançailles spirituelles ou du mariage mystique (purement mystique, celui-là) est bien une réaction à la sexualité, par sublimation, dit-on. On peut ajouter: par reprise de la vieille intuition qui veut que l’offrande au dieu, l’offrande de soi corps et âme, signifie un amour sans réserve, absolu.⇒HIÉROGAMIE, subst. fém.A. — MYTH. Noces sacrées d'un dieu (ou d'un humain divinisé) et d'une déesse, principalement noces de Zeus et d'Héra. Pasiphaé est reine-prêtresse-déesse. Son union avec le taureau est une hiérogamie; elle s'y charge de puissance divine (MONTHERL., Pasiphaé, 1936, p. 105).B. — RELIG. Union rituelle d'un homme et d'une femme, symbolisant l'union de deux divinités ou de deux principes divins de sexe opposé (rite de fécondité). Hiérogamies dans la célébration des mystères (cf. A. JOURJON ds R. Philol. fr., 1915-16, t. 29, p. 302).— P. ext. Je suis tenté par les cosmogonies. La mienne se rattache à ce qu'on appelle l'hiérogamie, c'est-à-dire au mariage du ciel et de la terre, du principe masculin et du principe féminin (...) il faut que les deux s'unissent pour qu'il y ait la moisson (J. DE BOURBON-BUSSET, Je n'ai peur de rien..., Paris, Gallimard, 1978, p. 117).REM. Hiérogamique, adj. Propre, relatif à une hiérogamie. Union hiérogamique. La constitution des fétiches africains s'obtient par la complémentarité hiérogamique de deux séries symboliques : l'une ouranienne (pieu), l'autre chtonienne (trou, caverne) (LAPLANTINE 1974).Prononc. : [
]. Étymol. et Hist. 1915-16 (A. JOURJON, loc. cit.). Composé des élém. hier(o)- et -gamie.
hiérogamie ['jeʀɔgami] n. f.❖♦ Didact. Union conjugale de caractère sacré. || Hiérogamie entre un dieu (ou un humain divinisé) et une déesse, dans les religions anciennes. || L'importance des hiérogamies dans la célébration des mystères.♦ Union rituelle entre un homme et une femme, dans certaines religions.❖DÉR. Hiérogamique.
Encyclopédie Universelle. 2012.